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Spectacle "Grand Peur et misère du IIIè Reich"

Publication : (actualisé le ) par C. Brunot, Claire Podetti, L. Pocztar

Les élèves de la classe de 3e 2, les élèves de 3e 1 et un élève de 3e 4 ont présenté le 9 juin à 20 h à la MJC de Palaiseau, la pièce de théâtre Grand Peur et misère du IIIè Reich de Bertolt Brecht, mise en scène par Didier Lesour.

Les élèves ont également exposé les travaux artistiques réalisés avec Caroline Cassel et la BD réalisée avec Garance Pocztar autour des biographies des déportés d’Orsay.

Folie que de vouloir retracer la vie d’inconnus à partir de rien ! Vivants ils étaient déjà invisibles ; et l’histoire les a pulvérisés. Ces poussières de siècle ne reposent pas dans quelque urne du temple familial ; elles sont en suspension dans l’air, elles voyagent au gré des vents, s’humectent à l’écume des vagues, paillettent les toits de la ville, piquent notre œil et repartent sous un avatar quelconque, pétale, comète ou libellule, tout ce qui est léger et fugace. Ces anonymes ce ne sont pas les miens, ce sont les nôtres. Il est donc urgent, avant l’effacement définitif, de retrouver les traces, les empreintes de vie qu’ils ont laissées, preuves involontaires de leur passage en ce monde. Ivan Jablonka

A nous revient désormais la tâche de rendre compte de « notre enquête biographique » sur Szulim Zyltman, Gitla Kupperberg, Sarah et Lazare Parzenczewski, qui ne peut être dissociée de ce que fut celle belle aventure menée avec une quarantaine de collégiens de 13-15 ans : de belles rencontres, des découvertes, des documents accumulés, des archives, un témoignage, mais aussi des questionnements, des doutes, des hypothèses, des visites, de magnifiques performances artistiques bref un projet tellement riche et polymorphe qu’il est presque impossible aujourd’hui de le restituer par écrit dans toute sa diversité.

Ce projet est né en 2020, nous avions alors décidé, fortes de nos expériences menées dans le cadre du projet Convoi 77, de travailler sur l’histoire de Palaiseau. Les élèves avaient alors rédigé les biographies de Moszeck Wisnia et Leopold Silbermann, déportés palaisiens du Convoi 44. Deux stolpersteine ont ancré ce travail d’histoire dans la mémoire de la ville, la salle de violon du Conservatoire de Palaiseau a pris le nom de Leopold Silbermann, en hommage à ce compositeur assassiné à Auschwitz.
Cette année, le projet a porté sur les déportés d’Orsay, commune voisine de Palaiseau, deux autres collèges et un lycée s’y sont associés. Chacun des établissements a travaillé sur des biographies différentes.Notre collège avait en charge la rédaction des biographies de quatre déportés : Szulim Zyltman, Gitla Kupperberg, Sarah et Lazare Parzenczewski.
Mais comment raconter leur vie d’avant la Shoah ? Tenter de les faire revivre alors que nous avions si peu de traces ? Comment écrire leur biographie pour être au plus prêt de leur quotidien avec ses moments de joie mais aussi de tristesse ? C’est par ces questions que nous avons présenté le projet aux élèves dès le mois de septembre. Véritable travail d’enquête historique, il fallait que les élèves se mettent dans la posture de l’historien, analyser les archives, les questionner les croiser, en chercher de nouvelles.
Nos premières recherches dans les archives (mairie de Paris, Fonds Bad Arolsen, Mémorial de la Shoah) ont vite montré leurs limites. Les quelques documents qui nous étaient envoyés ou que nous trouvions étaient ceux que nous possédions déjà. Nous n’avions aucune photographie des quatre déportés sur lesquels nous devions travailler.
Dans les archives municipales d’Orsay, nous avons découvert des documents que nous ne connaissions pas sur Gitla Kupperberg. Séparée de son premier mari, elle avait eu un deuxième enfant, Roger. Nous avons également retrouvé le fils de Szulim Zyltman, Georges. Mais apprenant notre travail, il n’a pas souhaité qu’il soit poursuivi et nous avons bien sûr respecté cette demande.
En cherchant des archives sur Sarah et Lazare, nous avons rencontré Catherine, leur petite fille. Et notre projet s’est transformé. Les photographies de Sarah et de Lazare, les anecdotes racontées par Catherine ont donné chair à nos biographies.
Mais pour Gitla, nous avons réalisé que de nombreuses questions resteraient sans réponse et qu’il faudrait en rendre compte dans notre biographie : ce vide, ces blancs que nous ne comblerons pas, car il n’y a plus de traces. Les élèves ont pris conscience que c’est cela aussi la Shoah : la disparition de personnes, de familles, mais également de tous les objets, photos, documents qui pourraient nous permettre de reconstituer ce que fut leur vie.

En participant à ce projet, nous voulions mener avec les élèves un véritable travail d’enquête historique en les initiant très modestement aux méthodes de l’historien : chercher des sources, les questionner, émettre des hypothèses, les mettre à distance. Les élèves ont réalisé comment l’historien « construit » pierre après pierre une biographie historique. Mais nous voulions également qu’ils aient la possibilité de rédiger une biographie plus « littéraire ».

Les ateliers de théâtre (toute l’année) et de pratiques plasticiennes ont donné à ce projet une dimension artistique qui nous paraît essentielle. Ils ont permis à chacun de s’investir en fonction de ses appétences, de sa sensibilité, de sa personnalité. Si toute la classe de 3è2 et les élèves volontaires de 3è1 et 3é4 ont participé au projet, chacun a choisi sa place : certains élèves ont travaillé sur les archives, d’autres sont devenus acteurs, costumiers, techniciens du son et des lumières, photographe... Tous les élèves ont participé à l’atelier BD. Quant à l’atelier de pratiques plasticiennes, la diversité des productions artistiques témoigne de la grande liberté laissée à chacun de s’exprimer en créant une œuvre, fut-elle la plus minimaliste possible. La richesse de toutes ces productions montre que ce projet est bien davantage qu’une simple réflexion sur la Shoah.
Ce sont aussi et peut-être surtout de belles rencontres entre les élèves, les professeures et les artistes, mais aussi avec Catherine Parent-Rosenthal, petite fille de Sarah et Lazare Parzenczewski qui ont donné une dimension sensible et humaine. Tous ces liens que nous avons tissés ensemble ont permis de faire de ce projet un véritable travail collectif, où les différences de chacun sont d’abord une richesse, un projet dans lequel chacun a grandi un peu au contact des autres. Ce sont de belles leçons d’humanité qui dépassent le cadre scolaire. Car c’est aussi et grâce à l’implication, à l’engagement de chacun que ce projet a pu se réaliser collectivement du début à la fin.

Nous voudrions adresser nos remerciements à Grégoire de Lasteyrie et David Ros, maires de Palaiseau et d’Orsay qui ont permis d’inscrire nos projets dans la mémoire de leur commune.
Un très grand merci à Isabelle Zdroui qui a généreusement partagé ses archives et Hervé Martin qui a cherché les localisations des habitations des déportés afin de pouvoir y poser des pavés de mémoire. Un très grand merci à Cyrille Chazal, qui nous a ouvert les archives de la commune d’Orsay.

Nous voudrions adresser nos remerciements les plus sincères et les plus chaleureux à Catherine Parent-Rosenthal, qui par sa venue a donné à nos biographies une dimension « sensible » et permis de donner un visage à Sarah et à Lazare.

Nos remerciements vont également à Garance Pocztar, Caroline Cassel, Didier Lesour et Gunter Demnig qui nous ont accompagnés dans ce projet et ont permis de lui donner cette dimension artistique si essentielle.

Nous voudrions enfin remercier tous les partenaires qui nous ont permis de concrétiser ce projet : la mairie de Palaiseau, la mairie d’Orsay, la Fédération Maginot, le Conseil général de l’Essonne (à travers l’action ODE 91), la DILCRAH, la DMCA du Ministère de la Défense.

Merci à Mesdames Cheinet et Dethelot, principales du collège qui ont permis à ce projet de se réaliser.

« Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu » Bertolt Brecht

Nous sommes convaincues que ces projets interdisciplinaires et artistiques permettent d’enseigner autrement l’histoire de la Shoah aux jeunes générations d’aujourd’hui. Interroger le passé afin de mieux comprendre le présent pour s’y engager, tel est l’objectif très ambitieux de nos projets.
Marion Bergogne, Clarisse Brunot, Marya Constant, Cendrine Jacquelin, Laurence Pocztar et Claire Podetti

Portfolio

Pavés de mémoire à Orsay

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